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Rapport sur la Table ronde sur la participation électorale des jeunes

Séance du matin – Thèmes clés

  • Le déclin de la participation électorale constitue un grand enjeu de société. La participation des jeunes, plus particulièrement la motivation à voter, représente un aspect important du problème et le point central de cette discussion.
  • Les « jeunes » ne forment pas un groupe homogène ou cohésif. Ils constituent un groupe démographique fragmenté, en évolution constante sur le plan de l’identité et des relations avec les institutions. Les efforts visant à augmenter la participation électorale des jeunes doivent tenir compte des besoins différents de ces groupes.
  • Le déclin de la participation électorale des jeunes devrait être examiné dans le contexte de profonds changements sociaux. Des enjeux comme la confiance dans notre système politique et la façon dont les jeunes perçoivent leur rôle en tant que citoyens sont des sujets importants à étudier.


Mot d’ouverture

La Table ronde sur la participation électorale des jeunes a eu lieu le 5 juin 2012 à l’hôtel Lord Elgin, à Ottawa.

Le directeur général des élections, Marc Mayrand, et le président-directeur général du Forum des politiques publiques, David Mitchell, ont coprésidé la séance.

Pour entamer la discussion, les coprésidents ont abordé la nature complexe du problème de la participation électorale déclinante chez les jeunes et ont insisté sur la nécessité, pour de multiples secteurs, d’élaborer une approche commune afin de s’attaquer au problème. Ce défi ne relève pas seulement des organismes de gestion électorale. Tous les Canadiens sont concernés par ce dossier. Il faut donc créer une initiative pancanadienne pour freiner le déclin de l’engagement civique des jeunes.

Au cours des 20 dernières années, la participation électorale n’a cessé de diminuer au Canada, et ce, dans tous les ordres de gouvernement. Ceux qui ne votent pas aux premières élections où ils peuvent exercer leur droit de vote sont moins portés à voter plus tard durant leur vie. Le taux de participation général n’a jamais été aussi bas – chez les jeunes, il se situe entre 34 % et 39 %. Les effets combinés du déclin de la participation des jeunes risquent ainsi d’avoir des répercussions de longue durée. À ce rythme, on pourrait bientôt voir moins de la moitié des électeurs admissibles au vote au Canada prendre la peine de se rendre aux urnes. À long terme, cette situation menace sérieusement l’intégrité de notre système démocratique.

Ce déclin de la participation n’est pas un problème simple, et les participants à la table ronde ont reconnu qu’il n’existait pas de solution miracle. Toutefois, ils ont été encouragés à tirer parti de la diversité des représentants présents à la séance et de leurs opinions pour proposer des idées constructives pouvant s’inscrire dans le cadre d’une stratégie globale de résolution du problème. Pendant la séance, les participants ont donc lancé des idées pour discussion et examen par le groupe. Le présent rapport sur la table ronde résume ces idées individuelles et les discussions en groupe.

Séance du matin : comprendre le problème

Objectif : Élaborer une vision commune du problème de l’engagement civique déclinant chez les jeunes Canadiens

La participation électorale diminue sur de nombreux plans, et bien que chaque groupe démographique affiche ses propres tendances, le niveau de plus en plus bas de la participation des jeunes est une importante source de préoccupation. Ce déclin constant compromettra la légitimité de nos instances législatives, et il réduit la mesure dans laquelle les citoyens estiment que le gouvernement tient compte de leurs voix. Il est donc urgent d’intervenir pour tenter de résoudre le problème. Cette intervention, en particulier dans le cas de la participation électorale des jeunes, nécessite une meilleure connaissance de la perception qu’ont les jeunes Canadiens de la participation civique ainsi que du contexte social général dans lequel ils vivent. Diane Pacom, de l’Université d’Ottawa, a animé la discussion du matin entre les participants, qui ont abordé des éléments clés du contexte sociétal dans lequel vivent les jeunes Canadiens.

Alors que nous cherchons à comprendre les facteurs qui influencent la participation électorale des jeunes, plusieurs participants ont souligné l’importance de comprendre la définition de « jeune ». Étant donné que l’on atteint de plus en plus tard les points de référence habituellement associés à l’âge adulte (p. ex. le mariage, la fin des études, l’achat d’une maison, etc.), le concept de « jeune » est aujourd’hui plus englobant. En même temps, les jeunes sont très divisés; leur identité change constamment, tout comme la manière dont les autres les perçoivent.

En essayant de mieux comprendre le groupe démographique cible, nous devons poser la question : qu’est-ce qui entraîne le détachement des jeunes à l’égard du vote? En fait, deux problèmes soulevés pourraient contribuer à ce phénomène : la nécessité d’assurer ce qu’on pourrait appeler la « valeur morale » de la démocratie et une nouvelle définition de la citoyenneté chez les jeunes.

Les participants à la table ronde au travail
Les participants à la table ronde au travail

Selon certains participants à la table ronde, la valeur morale de notre démocratie est liée à la confiance des jeunes à l’égard de notre système de gouvernance. Cette confiance est tout simplement absente chez les jeunes Canadiens d’aujourd’hui. Pour certains groupes de cette population, le manque d’attention accordée à des enjeux importants par les dirigeants politiques a nui à la confiance dans les institutions gouvernementales en place. Comme l’a dit un participant, les jeunes « décrochent », en quelque sorte, lorsqu’ils perdent l’intérêt pour un système politique qui leur paraît de moins en moins pertinent. Par contre, d’autres participants ont fait remarquer que le problème de la confiance n’est peut-être pas propre aux jeunes et que certaines combinaisons de facteurs pourraient contribuer davantage à leur manque de volonté de voter. Certains ont indiqué que bien souvent, les jeunes Canadiens n’ont pas accès à l’ensemble du système, et pas seulement aux bureaux de scrutin le jour de l’élection. Ils se sont demandé : si les institutions n’offrent pas aux jeunes les outils nécessaires pour participer de façon significative à la gouvernance, pourquoi les jeunes devraient-ils en retour jouer un rôle actif dans ces institutions? Par ailleurs, les fondements de la citoyenneté ne sont pas les mêmes pour beaucoup de jeunes Canadiens. Dans un contexte social en évolution constante, les concepts traditionnels de la citoyenneté changent, et les jeunes sont moins enclins à considérer le vote comme un devoir civique.

Ces questions appartiennent généralement à la catégorie de ce que certains ont appelé les « obstacles motivationnels ». Ces obstacles ont une incidence sur la volonté de voter des gens, et non sur leur capacité réelle à voternote 1.

Compte tenu de la discussion du matin et des résultats d’un sondage mené auprès des participants avant la table ronde, trois principaux sujets de discussion ont été cernés pour les groupes de travail de l’après-midi :

  1. Entrer en contact avec ceux qui sont difficiles à joindre : y compris améliorer l’accessibilité des institutions pour les jeunes, se concentrer sur les groupes de jeunes marginalisés et utiliser de nouvelles méthodes d’organisation et de tenue du scrutin le jour de l’élection pour que les jeunes trouvent le processus plus facile et se sentent plus à l’aise de voter.
  2. Accroître les connaissances politiques : y compris travailler aux programmes d’éducation officiels ou non, et déployer d’autres efforts visant à améliorer les connaissances générales sur la vie civique.
  3. Rendre la politique et la participation pertinentes et en faire la norme : y compris se concentrer sur les moyens de raviver l’intérêt des jeunes pour le système, trouver des idées pour changer la perception selon laquelle un vote ne compte pas et améliorer les relations entre les jeunes et les dirigeants politiques.

Déjeuner de travail : des idées de mesures à prendre

Peter MacLeod anime la discussion à l’heure du déjeuner
Peter MacLeod anime la discussion à l’heure du déjeuner

Pendant un déjeuner de travail, les participants ont eu l’occasion d’examiner les processus de mobilisation du public ainsi que de discuter de nouvelles méthodes de travail avec les citoyens qui visent à accroître leur participation à la vie politique et démocratique. Peter MacLeod, de la firme de mobilisation du public MASS LBP, a animé la discussion. D’importants points soulevés ont aidé les participants à lancer des idées à examiner pendant la discussion de l’après-midi, y compris la nécessité de renforcer le niveau général de « santé démocratique » chez les citoyens, en particulier les jeunes. Il est essentiel d’offrir des possibilités d’apprentissage ainsi que d’insister sur l’importance de trouver davantage de points d’interaction qui permettent aux jeunes d’influencer le gouvernement à tous les niveaux et, ainsi, d’avoir un « effet » sur l’État.

Une mesure possible consisterait à tirer parti d’activités publiques pour créer de nouvelles occasions de participation, par exemple le 150e anniversaire de la Confédération en 2017. En s’inspirant du travail accompli lors des célébrations du centenaire du Canada en 1967, le 150e anniversaire pourrait miser sur le sentiment d’attachement au pays grâce à de nouveaux efforts favorisant la participation du public.

Au cours de la discussion qui a suivi, de nombreux participants ont réitéré la nécessité de stimuler la vie civique en trouvant des moyens d’accroître la pertinence de la politique. Plusieurs personnes ont fait remarquer que les partis politiques et les élus doivent en faire davantage pour susciter l’intérêt des jeunes.

Séance de l’après-midi – Thèmes clés

  • Les jeunes difficiles à joindre sont notamment les jeunes sans emploi, les jeunes Autochtones, les jeunes qui résident en région rurale et les nouveaux arrivants au Canada. On peut entrer en contact avec eux grâce à un large éventail de nouvelles méthodes (p. ex. les médias sociaux), et les institutions devraient adapter l’utilisation qu’ils font de ces outils pour répondre à ces besoins particuliers.
  • De nouvelles méthodes d’éducation civique peuvent aider les jeunes Canadiens à trouver des rôles significatifs à jouer ainsi qu’à déterminer la manière dont les institutions influencent les questions qu’ils considèrent comme importantes.
  • Des efforts devraient être déployés pour faire en sorte que les institutions en place répondent mieux aux réalités changeantes de la citoyenneté et s’y adaptent. Les progrès accomplis en vue d’objectifs précis devraient faire l’objet d’un suivi rigoureux.

Séance de l’après-midi : chercher des solutions

Objectif : S’entendre sur des mesures collectives (ou individuelles) à prendre pour s’attaquer au problème

Un groupe de travail a été formé pour chacun des trois sujets cernés. L’objectif est d’amener les participants à discuter entre eux et à proposer des mesures possibles pour instaurer un changement et aider à mobiliser les jeunes Canadiens.

Groupe de travail 1 : Entrer en contact avec ceux qui sont difficiles à joindre

Les membres de ce groupe de travail ont noté que les jeunes « difficiles à joindre » ne forment pas un groupe homogène. Ces jeunes appartiennent à de nombreux groupes de la société, tels que les jeunes sans emploi, les jeunes Autochtones vivant dans les réserves ou hors réserve, les jeunes résidant en région rurale et les nouveaux arrivants au Canada, entre autres.

Différentes stratégies devront être établies pour joindre ces groupes, et il sera important de surveiller les résultats dans chaque sous-ensemble.

Dans le cas des jeunes Autochtones, il serait bénéfique de combiner l’éducation traditionnelle avec l’éducation civique pour que les connaissances historiques puissent favoriser de nouvelles formes d’engagement civique. L’accessibilité de ce groupe démographique au vote pourrait être améliorée si l’on établissait des bureaux de scrutin dans des lieux plus accessibles et familiers pour les jeunes Autochtones, comme les Centres d’amitié.

Quant aux autres groupes difficiles à joindre, bon nombre de propositions formulées pourraient s’inscrire dans le cadre d’un vaste projet visant à stimuler la participation. Voici quelques idées lancées :

  • établir des listes électorales provisoires pour les jeunes de 16 et 17 ans;
  • faciliter l’inscription et le vote en utilisant des outils en ligne et un processus de préinscription;
  • faire de la promotion dans les médias sociaux en ciblant les groupes difficiles à joindre, et offrir aux jeunes de ces sous ensembles clés des trousses spécialisées d’introduction au vote;
  • encourager les ambassadeurs du vote chez les jeunes à transmettre leurs connaissances et à susciter une passion pour la vie civique;
  • tirer profit des technologies disponibles pour accroître l’accessibilité du vote à l’aide d’outils auxquels la plupart des gens ont déjà accès (Web, téléphones cellulaires, médias sociaux, etc.).

De telles idées visent à combler le fossé entre les jeunes difficiles à joindre et le processus électoral. Le but est d’amener les leaders actifs à travailler avec les jeunes Canadiens en orientant l’élection vers eux – d’où l’objectif « Aller vers les jeunes pour l’élection ».

Andrea Landry résume la séance du groupe de travail sur les jeunes difficiles à joindre
Andrea Landry résume la séance du groupe de travail
sur les jeunes difficiles à joindre

Groupe de travail 2 : Accroître les connaissances politiques

La discussion de ce groupe était centrée sur trois questions :

  1. Que sont les connaissances politiques?
  2. Qu’est-ce que nos efforts devraient cibler?
  3. Quelles mesures peuvent être prises?

Les participants ont convenu que les connaissances politiques englobaient la connaissance des institutions, du processus électoral et de la manière de participer, les connaissances expérientielles fondées sur la participation antérieure (y compris les perceptions négatives) ainsi que la connaissance des enjeux.

Les membres du groupe de travail ont noté que les efforts visant à accroître les connaissances politiques et les connaissances générales sur la vie civique devraient cibler non seulement les électeurs, mais aussi les jeunes qui vont toujours à l’école (de la maternelle à la 12e année). En raison du temps de discussion limité, le groupe de travail s’est concentré sur les jeunes qui fréquentent toujours l’école et ont proposé des idées qui peuvent être très bien intégrées à l’apprentissage en classe.

À la suite de la discussion du groupe, les participants ont cerné des secteurs d’intervention possibles pour accroître les connaissances sur la vie civique :

  • augmenter les échanges entre les jeunes, d’une part, et les députés et autres élus, d’autre part;
  • établir un modèle de processus législatif dans des exercices en classe;
  • intégrer la politique à d’autres activités scolaires (p. ex. inclure les processus décisionnels démocratiques dans ces activités);
  • accroître les occasions de contact entre les jeunes et les dirigeants dans toutes les sphères de la vie civique;
  • offrir davantage de possibilités d’encadrement entre pairs dans le domaine de la participation civique;
  • établir des institutions démocratiques modèles en classe (p. ex. une Chambre des communes fictive);
  • élaborer avec les élèves un code de responsabilité civique;
  • permettre aux élèves de mener des campagnes fictives pour leur donner un aperçu du fonctionnement du monde politique;
  • renforcer l’éducation civique en classe au moyen d’autres activités communautaires qui se sont déjà avérées efficaces.

Taylor Gunn résume la séance du groupe de travail sur la pertinence de la politique et de la participation
Taylor Gunn résume la séance du groupe de travail
sur la pertinence de la politique et de la participation

Groupe de travail 3 : Rendre la politique et la participation pertinentes et en faire la norme

Les jeunes qui ne votent pas ne doivent pas être considérés comme complètement désintéressés. On doit plutôt y voir un signe que pour ces jeunes, le vote n’est pas pertinent ou ne constitue pas le meilleur moyen d’influencer le cours des choses. En fait, il faut que tous les citoyens croient à l’efficacité de leur participation au processus électoral.

Notre système de gouvernance doit changer pour mieux refléter les gens qu’il représente. Les jeunes Canadiens, en particulier les étudiants, devraient contribuer activement à orienter cette réforme et participer à la modernisation du système. Davantage de recherches et une meilleure sensibilisation sont nécessaires pour amorcer un tel changement, et les organismes de gestion électorale devraient appuyer la cause.

Voici certains secteurs d’intervention possibles :

  • encourager les jeunes à concevoir, à créer et à réaliser des sondages annuels sur leur propre participation, ainsi qu’à rendre compte publiquement des réussites et des problèmes relevés;
  • mieux intégrer les points de vue des jeunes aux activités permanentes de recherche et de sensibilisation des organismes de gestion électorale;
  • envisager des mécanismes de vote obligatoire, ce qui ne devrait être fait que parallèlement à une meilleure éducation civique.

Note 1 Consultez le document de travail à l’annexe C, rédigé avant la séance, qui fait mention de recherches sur ces questions.