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Rapport de vérification indépendant sur l'exercice des attributions des fonctionnaires électoraux – 42e élection générale

Sommaire

PricewaterhouseCoopers (PwC) a été mandaté, en application de l'article 164.1 de la Loi électorale du Canada, pour effectuer une vérification légale indépendante et faire rapport quant à la question de savoir si les scrutateurs, les greffiers du scrutin et les agents d'inscription ont, les jours de vote par anticipation et le jour du scrutin, exercé correctement les attributions que les articles 143 à 149, 161, 162 et 169 (ci-après « les articles pertinents ») de la Loi électorale du Canada (LEC ou « la Loi ») leur confèrent.

Outre les diverses tâches requises pour préparer les jours de vote par anticipation et le jour du scrutin, et pour offrir son soutien en temps voulu, chaque directeur du scrutin est chargé de nommer un scrutateur, un greffier du scrutin et un agent d'inscription (collectivement appelés « fonctionnaires électoraux ») pour exécuter diverses fonctions liées aux élections dans un lieu de scrutin. Il faut un scrutateur et un greffier du scrutin par bureau de scrutin et, habituellement, un agent d'inscription pour chaque lieu de scrutin. Ce sont les rôles de ces fonctionnaires électoraux qui sont visés par la présente vérification, effectuée conformément à l'article 164.1 de la Loi.

Aux termes des articles pertinents de la Loi, le mandat des fonctionnaires électoraux consiste à veiller à l'inscription des électeurs, à demander et à examiner les preuves d'identité et d'adresse de chaque électeur et à utiliser et remplir les formulaires et certificats prescrits les jours de vote par anticipation (soit du 9 au 12 octobre 2015) et le jour du scrutin (soit le 19 octobre 2015).

Tout citoyen canadien qui a atteint au moins 18 ans le jour de l'élection peut voter dans la circonscription dans laquelle il demeure. Parmi l'éventail de procédures en vertu de la LEC pour protéger l'intégrité du processus électoral, l'une d'elles oblige l'électeur à prouver son habilité à voter (identité et résidence) avant de recevoir un bulletin de vote. Pour la plupart des électeurs – ceux qui sont déjà inscrits à leur adresse actuelle et qui, par conséquent, figurent déjà sur la liste électorale –, les procédures du jour de l'élection se résument à la simple et rapide vérification d'une ou de plusieurs pièces d'identité acceptables pour confirmer l'identité et l'adresse de résidence. D'après les résultats de nos tests, environ 90 % des électeurs ont exercé leur droit de vote de cette manière. En ce qui concerne les 10 % restants, des procédures administratives spéciales ont dû être appliquées avant la délivrance d'un bulletin de vote.

Les fonctionnaires électoraux doivent appliquer des procédures spéciales à l'égard de tous les électeurs qui se trouvent dans les situations suivantes : ils doivent faire attester leur adresse, ils ne sont pas inscrits sur la liste électorale, leur nom a été biffé par erreur sur la liste électorale, ils doivent apporter des corrections mineures à leurs renseignements d'inscription. Dans certaines circonstances, il peut être nécessaire d'appliquer des procédures spéciales comme produire un certificat approprié, faire prêter un serment verbal ou écrit à l'électeur ou obtenir une déclaration de sa part, ou encore lire un avertissement verbal ou faire prêter serment à un électeur et à son répondant.

D'après ce que nous avons compris, Élections Canada (EC) a mis en place des procédures de contrôle de la qualité et amélioré son matériel de formation depuis la tenue de l'élection générale précédente (en 2011). Nous savons également qu'EC a du mal à recruter des ressources temporaires qui possèdent les meilleures compétences dans l'ensemble des circonscriptions dans un court délai avant la tenue d'une élection. Nous avons pris ces facteurs en considération lorsque nous avons élaboré notre stratégie de vérification.

Notre vérification ne visait pas à valider les résultats de l'élection, à déterminer si des fonctionnaires électoraux autres que les scrutateurs, les greffiers du scrutin et les agents d'inscription ont exercé les fonctions que leur confèrent les dispositions législatives, à évaluer l'exercice des fonctions prévues par les dispositions législatives qui ne sont pas expressément énoncées dans l'article 164.1 de la Loi ou à évaluer les contrôles administratifs d'EC outre ceux qui ont été mis en place expressément dans le but d'appuyer les fonctionnaires électoraux dans l'exécution de leurs attributions en vertu de l'article 164.1 de la Loi.

Les constatations et conclusions de notre vérification sont présentées sur une base globale. Nos résultats ne visent pas une circonscription, un lieu de scrutin, un bureau de scrutin ou un fonctionnaire électoral en particulier. Vous trouverez ci-après nos principales constatations et nos autres observations. Nos recommandations sont présentées à l'Annexe A du présent rapport.

Notre vérification a été effectuée conformément à la Norme canadienne de missions de certification 3001, Missions d'appréciation directe (NCMC 3001).

Critères de vérification

Aux fins de cette vérification, les principaux critères et, par conséquent, notre mandat de vérification, sont expressément prescrits dans les articles pertinents de la Loi susmentionnés. Il nous a donc fallu déterminer, en tenant compte du contexte opérationnel d'EC, ce qui serait considéré comme un écart important dans l'exercice des attributions des fonctionnaires électoraux. En collaboration avec les fonctionnaires d'EC et le Comité externe pour la vérification d'EC, nous avons convenu de deux niveaux de contrôles et de procédures, ainsi que de seuils de communication. Les contrôles et procédures principaux sont ceux qui sont exercés par les fonctionnaires électoraux en vue d'établir la qualité d'électeur et l'habilité à voter. Les contrôles secondaires sont ceux qui permettent d'étayer la qualité d'électeur et l'habilité à voter déjà établies de l'électeur et sont généralement liés à la tenue des documents.

L'établissement de seuils de communication a revêtu une importance critique dans la planification de la vérification. Ces seuils ont été convenus avec la direction et avec le Comité externe pour la vérification et tiennent compte de l'importance relative du contrôle. Pour les contrôles principaux, un écart de 5 % ou plus a été considéré comme une constatation importante. Pour ces mêmes contrôles principaux, un écart de 2 % à 4,9 % a été considéré comme devant être communiqué parmi les autres observations. Dans le cas des contrôles secondaires, un écart de 11 % ou plus a été considéré comme devant être communiqué parmi les autres observations.

Ces seuils ont été établis à la lumière d'un jugement de la Cour suprême du Canada (Opitz c. Wrzesnewskyj, 2012 CSC 55), qui précisait, entre autres, ce qui suit : « Vu la complexité de l'administration d'une élection fédérale, les dizaines de milliers de travailleurs électoraux en cause, dont beaucoup n'ont aucune expérience pratique, et la courte période durant laquelle il faut les embaucher et les former, les erreurs administratives sont inévitables. »

Approche

Pour pouvoir fournir l'assurance raisonnable que les fonctionnaires électoraux ont exercé les attributions que leur confère la LEC, nous avons prélevé un échantillon de circonscriptions dans l'ensemble du Canada et réuni des éléments probants suffisants et appropriés pour tirer une conclusion à l'égard de l'objectif de la vérification. Les techniques utilisées pour réunir ces éléments probants ont compris l'observation directe, les demandes d'information et l'inspection des documents électoraux (soit les certificats, les formulaires, les rapports et les autres documents requis pour servir un électeur et consigner les résultats).

Pour déterminer si les scrutateurs, les greffiers du scrutin et les agents d'inscription ont exercé correctement les attributions que leur confèrent les articles pertinents de la Loi, nous avons établi qu'il était nécessaire de mettre en œuvre des procédures de vérification sur place aux bureaux de scrutin tous les jours de vote par anticipation et le jour du scrutin (le 19 octobre 2015), ainsi qu'à l'égard des documents retournés à l'entrepôt d'EC après la tenue de l'élection. Notre échantillon comprenait des bureaux de scrutin dans chaque province et chaque territoire du Canada, et a permis à PwC de vérifier plus de 10 000 interactions avec les électeurs.

Nous avons évalué la conception et la mise en place de certains contrôles administratifs, en l'occurrence la formation des fonctionnaires électoraux et les guides et autres documents connexes. Notre travail a inclus un examen approfondi du contenu des programmes de formation, la participation à un échantillon de séances de formation et des entrevues avec des directeurs du scrutin, des agents de recrutement et des préposés à la formation. Les jours de vote par anticipation et le jour du scrutin, nous avons posé une série de questions aux fonctionnaires électoraux pour obtenir leur point de vue sur leur expérience de formation et le matériel connexe.

Sommaire des constatations

Nous avons conclu ce qui suit :

  1. Tous les jours de vote par anticipation et le jour de scrutin, les fonctionnaires électoraux ont exercé correctement les attributions que leur confèrent les articles pertinents de la Loi en ce qui a trait aux électeurs ordinaires (qui représentent environ 90 % des électeurs). Nous n'avons aucune constatation importante à formuler relativement à des écarts dans les contrôles et procédures principaux en ce qui a trait aux électeurs ordinaires.

  2. Tous les jours de vote par anticipation et le jour de scrutin, les fonctionnaires électoraux ont exercé correctement les attributions que leur confèrent les articles pertinents de la Loi en ce qui a trait aux électeurs visés par des procédures spéciales (qui représentent environ 10 % des électeurs). Nous avons une seule constatation importante à formuler relativement à un écart touchant les contrôles principaux en ce qui a trait aux procédures spéciales. Nous avons relevé que certaines procédures administratives n'ont pas été appliquées de façon uniforme, mais ces déficiences étaient liées à la tenue des documents.

  3. Le contenu des programmes de formation et la prestation de ces programmes ont été efficaces. Les fonctionnaires électoraux ont indiqué que les guides et autres outils fournis avaient été utiles (dans la mesure où ils avaient eu le temps de s'y reporter) pour exercer leurs responsabilités et pour diagnostiquer les problèmes lorsqu'ils avaient des hésitations quant à la façon de procéder. Nous avons cerné des occasions de consacrer plus de temps pendant la formation à l'application des procédures spéciales et à la documentation connexe, car certains fonctionnaires électoraux ne se sentaient pas parfaitement outillés pour faire face à ces scénarios après avoir suivi leur programme de formation en classe.

EC nous a demandé de lui faire part de toute autre observation pertinente dans le cadre de notre travail et de l'aider à améliorer ses processus. Dans ce contexte, nous avons formulé un certain nombre d'observations supplémentaires, dont nous avons fait part à EC. Les deux observations les plus importantes sont énoncées ci-après. Ces observations ne sont pas directement liées à l'étendue de notre vérification et, de ce fait, n'ont pas eu d'incidence sur notre conclusion globale.

  • L'approche utilisée actuellement pour servir les électeurs est de nature manuelle. Pour les électeurs ordinaires, ce processus exige que le greffier du scrutin recherche le nom de l'électeur parmi des dizaines de pages de la liste électorale et, une fois l'identité et l'adresse de l'électeur validée, qu'il biffe le nom de l'électeur à l'aide d'une règle et qu'il inscrive que celui-ci a voté. Pour les électeurs à l'égard desquels des procédures spéciales doivent être appliquées, les tâches manuelles comprennent la production et la préparation de certificats et d'autres formulaires, y compris, dans bien des cas, l'obtention de la signature de l'électeur et, dans tous les cas, la signature du scrutateur et la consignation d'une entrée correspondante dans le cahier du scrutin. Les processus manuels présentent intrinsèquement un risque d'erreur humaine. Ce risque est amplifié lorsque des fonctionnaires électoraux qui ne sont pas parfaitement à l'aise avec les différents scénarios de vote et la documentation connexe doivent composer en outre avec les pressions liées aux longues files d'attente et au mécontentement des électeurs. Nous croyons que ce processus pourrait être simplifié.
  • Dans le Registre du vote au bureau de vote par anticipation, formulaire qui n'est requis que les jours de vote par anticipation, le greffier du scrutin doit consigner le nom complet et l'adresse complète de l'électeur, puis demander à l'électeur de signer le document. Une fois que l'électeur a voté, le greffier du scrutin confirme le tout en indiquant que l'électeur « a voté » sur le formulaire. Le registre du vote doit être signé par l'électeur, ce qui permet à EC de confirmer que celui-ci a voté par anticipation dans l'éventualité où l'électeur tente de voter de nouveau le jour du scrutin. En raison du taux de participation accru et imprévu des électeurs les jours de vote par anticipation et de la documentation manuelle supplémentaire requise pour servir chaque électeur, nous avons observé des retards importants et de longues files d'attente aux bureaux de scrutin partout au pays. Cette situation a causé énormément de frustration et de mécontentement chez les électeurs. Pendant ce temps, les greffiers du scrutin éprouvaient eux aussi de la difficulté à composer avec le nombre d'électeurs en attente et à se concentrer pour servir au mieux les intérêts des électeurs. Encore une fois, nous estimons que ce processus pourrait être simplifié.

Sommaire des recommandations

Nous souhaitons porter trois recommandations principales à l'attention du directeur général des élections (DGE). Il est à noter que certaines de ces recommandations, si elles sont mises en œuvre, pourraient éliminer la nécessité d'en appliquer d'autres. Dans certains cas, la mise en œuvre pourrait nécessiter des changements d'ordre législatif. Nous suggérons au DGE d'évaluer minutieusement chaque recommandation et de tester pleinement toute recommandation qu'il pourrait choisir de mettre en œuvre, le cas échéant. Les recommandations proposées, ainsi que les réactions d'EC à l'égard de celles-ci, se résument comme suit (l'énoncé complet des recommandations est présenté à l'Annexe A du présent rapport).

  1. Moderniser le processus électoral, et plus précisément, automatiser certaines étapes.

  2. Envisager la possibilité de simplifier les procédures aux bureaux de vote par anticipation et les procédures spéciales.

  3. Envisager des améliorations au programme de formation existant pour s'assurer qu'on consacre suffisamment d'attention et de temps à l'application des procédures spéciales et veiller à ce que les fonctionnaires électoraux comprennent pourquoi et comment ces procédures sont appliquées.